Sale bête !

02/07/2015

Nottingham, La Ville, La Taverne, La salle à manger

13 mai 1192 – A la nuit tombée

Siwan suivait le maure sans trop savoir qui penser ou quoi faire. Elle lui avait posé des questions mais pour le moment n’avait reçu aucune réponse. Se méfiant de cet homme à la peau noire, elle le suivait à distance, attentive à tout mouvement ou bruit suspect.
Il semblait clair à présent que les larbins de la ville n’étaient pas très malins mais également qu’il y avait de sérieux problèmes dans les environs. Déjà tous ces pauvres et ces mendiants qu’elle avait vu… Il y avait toujours eu, des plus pauvres que d’autres, même là-bas, dans son pays natal. Mais pas autant qu’ici. Ici on aurait dit qu’ils poussaient sur les arbres comme des fruits mûrs…

Cela faisait maintenant un long moment qu’ils marchaient dans la forêt et malgré ses excellents reflexes de chasseuse, avec la nuit qui tombait, la galloise perdait ses repères un à un. Après plusieurs minutes à marcher, elle comprit que le hors-la-loi la faisait tourner en rond, sans doute pour justement lui faire perdre ses repères.
Resserrant sa prise sur le manche de son coutelas de chasse, seule arme qu’elle avait gardé, elle fronça les sourcils mais s’abstint de tout commentaire.

Finalement, il faisait nuit noire quand le maure lâcha un hululement de chouette auquel répondit un cri de buse variable. Relevant la tête, Siwan s’attendit à une embuscade mais au contraire, son guide lui fit signe de le suivre.
Après quelques mètres supplémentaires, se découvrit dans une cuvette naturelle un amas de petites tentes et de grottes à demi ensevelies sous les feuilles mortes. Quelques feux protégés illuminaient le campement de façon tamisée, quasiment impossible à repérer de loin.

Ouvrant de grands yeux devant l’abondance de femmes et d’enfants dans le campement, la galloise resta bouche-bée et se contenta de suivre le maure qui se dirigea sans hésiter vers un grand gaillard. Après une discussion rapide, un signe de tête sec en direction de la grande grotte et une accolade, le maure se dirigea vers la grande ouverture sans plus se soucier d’elle.
La demoiselle, consciente qu’elle était perdue si elle sortait du campement, décida de visiter un peu.

Des hennissements attirèrent son attention et elle s’y dirigea. Là se trouvaient des chevaux de toutes tailles et de tout usage, passant des bêtes de course à celles, plus pommelées, de trait… Et au milieu de toutes ces bêtes, un étalon noir paissait tranquillement.
Restant un instant interloquée, Siwan siffla finalement et la bête, redressa brusquement la tête caracolant jusqu’à elle toute fière. Rigolant la galloise serra Tywyll dans ses bras et lui caressa la crinière avant de commencer à défaire son paquetage resté sur sa monture.

« Ah Ychydig Rascal ! Oedd gennych i mi yn dda ! (Petit coquin ! Tu m’as bien eue !) Ac yn dweud fy mod yn poeni amdanoch chi ! (Et dire que je m’inquiétais pour toi !) »

L’étalon hennit une nouvelle fois, joueur, avant de fourrer ses naseaux humides dans le cou de la galloise qui sursauta et le repoussa en riant.
Son paquetage défait, elle relâcha sa monture qui alla rejoindre ses pairs et ressortit de la grotte, se demandant quoi faire.

04/06/2008

Paul était encore une fois chargé de nourrir les chevaux. Il était assez grand pour le faire mais pas encore assez pour commencer les entrainements. Il en avait plus qu’assez de jouer les palefreniers mais c’était Robin lui-même qui lui avait confié cette tâche en lui disant qu’elle était très importante alors… Alors même s’il en doutait, il s’acquittait de son devoir pour mériter son repas quotidien.
Arrivant avec un gros sac de pommes usées, il entra dans la grotte chauffée par la chaleur des bêtes. Posant le sac avec un grognement, il le renversa sur le sol, au milieu de la grotte. Il s’attela ensuite à mettre dans la charrette à main le foin usagé. Il fourchait aussi vite que possible, cette tâche lui faisant froncer le nez de dégoût.

Bientôt il commença à râler. A la moitié de son travail, il décida de faire une pause et saisit sa fourche comme une lance. S’imaginant bientôt face à un des hommes du Shérif il le mit au défis de se défendre et le provoqua comme il imaginait Robin le faire.
S’engageant bientôt dans un furieux combat imaginaire, il ne vit pas la rousse flamboyante qui se tenait appuyée à un mur et qui le regardait d’un air moqueur.
Le manège dura ainsi une ou deux minutes avant que Paul ne ressente des douleurs dans les bras à force de brandir son outil dans le vent. Il le posa alors en soufflant et tenta de reprendre sa respiration.

Derrière lui un toussotement se fit entendre et il se retourna vivement, apeuré.

02/07/2015

Siwan réfléchissait. Elle tentait de mettre de l’ordre dans ses idées mais… Tout allait beaucoup trop vite pour elle. Quelques heures à peine auparavant, elle recueillait des informations paisiblement dans un taverne, comme elle le faisait depuis des mois… Et maintenant elle était là, dans une grotte qui sentait le cheval et le foin, abandonnée là par son guide noir.
Elle ignorait totalement où il était allé mais elle n’osait désormais plus sortir. Après tout même s’il l’avait tirée d’un fort mauvais pas, elle restait méfiante. On n’était jamais à l’abri d’une embuscade par les temps qui couraient. Au moins ici il y avait Tywyll et elle connaissait les lieux.

Elle ignorait absolument quoi faire quand un jeune garçon entra, l’air renfrogné. Elle se recula dans l’ombre de la grotte à l’entrée unique et l’observa, main sur son couteau de chasse, oreilles tendues, aux aguets.
L’adolescent commença à nourrir les chevaux sans même l’apercevoir. Il fourragea ensuite le foin sale en grommelant à qui mieux mieux et cette attitude revêche tira un sourire amusé à la galloise.
Quand il entama un combat imaginaire, elle le regarda faire, de plus en plus hilare. Elle avait l’impression de se revoir au même âge quand son père refusait de l’entrainer et qu’elle avait décidé de le faire elle-même. A ce souvenir, son sourire s’estompa et elle fut prise de nostalgie.

Son pays lui manquait. Ses parents aussi. Ils étaient vieux à présent et elle avait toujours peur qu’à son retour ils soient allés rejoindre leurs ancêtres… Et puis elle craignait aussi de ne jamais retrouvé la fille de son seigneur… Et même si sa tête refusait de le reconnaitre, son cœur lui murmurait depuis un certain temps déjà que sa maitresse gisait dans quelque fossé.
Secouant la tête, elle toussota pour attirer l’attention du jeune homme qui se retourna en bondissant. Elle leva les yeux et sortit de l’ombre.

« Holà du calme. J’aimerais que tu me dises où on est. Et t’es qui toi ? Et le demon du (démon noir) où est-il ?
- On est au camp de Robin des Bois et puis si vous parlez d’Azeem il est… Hey mais pourquoi j’vous réponds, j’vous connais pas ! Vous êtes une espionne c’est ça ?!
- Ahah artless (naïf). Ton Azeem là il m’a amené ici. Et puis pouf, partit.
- Mouais… Bougez pas ! Je vais chercher quelqu’un. »

Siwan opina et se rappuya au mur tandis que l’ado partait en courant. Elle patienta à peine quelques secondes avant de l’entendre crier en plein milieu du campement des choses qu’elle ne comprit pas. Jurant tout bas, pensant à un coup monté, elle se cacha derrière une meule de foin et dégaina son couteau.

Quelques instants plus tard un homme s’approcha, mains levées. Il plissa les yeux et toussota avant de déclarer :

« Je m’appelle Piotr. Je ne vous veux pas de mal. Azeem est partit en conseil de guerre avec Robin… Ils ne peuvent pas vous parler mais on peut vous offrir à manger. Vous êtes la bienvenue ici. »

Siwan hésita un instant avant de sortir, rangeant son couteau. L’homme, un grand échalas aussi roux que l’adolescent qu’elle avait rencontré avant lui sourit gentiment avant de faire demi-tour.
La galloise, jetant un regard à son étalon qui paissait paisiblement, se rassura en se disant que si l’animal n’avait pas eu confiance, il ne serait pas venu, décida de suivre son hôte, à bonne distance cependant.

Elle plissa les yeux en débouchant sur une espèce de place centrale en creux où brûlaient de nombreux feux de camp. Là des gens devisaient paisiblement tout en s’occupant. Certains en cousant des lingues, d’autres en taillant des figurines dans du bois… Aucun n’avait l’air de vouloir l’égorger sauvagement aussi eut-elle le temps de se détendre avant qu’on ne lui désigne un tabouret.
S’asseyant prudemment, elle jetait des regards méfiants tout autour d’elle, gardant son couteau à portée de main.

Une dame rondelette vint lui apporter un grand bol de soupe et un morceau de pain noir. La remerciant d’un signe de tête étrangement timide, elle commença à manger tandis que le dénommé Piotr recommençait à lui parler.

« Ici c’est le camp de Robin des Bois. Tous les gens d’ici sont des hors-la-lois. Des rebelles. Nous avons été chassés de chez nous car nous ne pouvions plus payer les taxes. Nous sommes ici pour nous battre, pour nous révolter contre les nobles qui nous volent tout.
- Je vois… Et parmi ces nobles, y-a-t-il un dénommé Sir Fenry ?
- Oui. Il est arrivé il y a peu mais il reste très mystérieux. Tout ce que nous savons c’est qu’il n’est pas de notre côté.
- C’est un celwyddog, un menteur. Il a enlevé ma maitresse, je suis à sa recherche.
- Oh et bien dans ce cas, je vous introduirais auprès de Robin dès que possible. »

Opinant à nouveau, Siwan termina son repas, devisant avec le sympathique Piotr qui lui fit un résumé détaillé de la situation de la région et au fond d’elle la galloise n’avait aucune peine à le croire. Ce qu’elle avait constaté en ville un peu plus concordait avec ce qu’il lui disait. Plus le temps passait et plus elle se sentait obligée de rester. Laisser tous ces pauvres gens sans aide était contre ses principes. Et le fait que Sir Percy soit visiblement stationné à Nottingham la confortait dans l’idée que son destin était ici.

Quand la nuit fut bien avancée, on l’amena à une tente inoccupée et elle réussit à y passer une nuit à peu près potable, rassurée par les sourires des habitants des lieux qui n’avaient pour la plupart rien de combattant.
Au matin, elle se réveilla à l’aube et après un petit déjeuner léger, fut convoquée dans la tente du chef. Une longue discussion plus tard, elle se retrouvait sous la houlette attentivement du Maure Azeem et officiellement hors-la-loi à l’essai.

Les jours passèrent lentement, Siwan affectée à l’entrainement des archers, quand on sonna le rassemblement un matin très tôt. Elle qui était réveillée s’approcha, curieuse. Elle ne comprit pas tout le discours mais sourit en se rendant compte d’une chose : sa première mission était en marche.

Les Alentours de Nottingham et Sherwood, Forum Temporaire : le Tournoi du Shérif